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🇫🇷 L’archevĂŞque d’Avignon soutient les djihadistes offensĂ©s : « Non, il n’existe pas de droit au blasphème ! »

Mgr Cattenoz, archevĂŞque d’Avignon :

Une question me travaille depuis des semaines : le blasphème est-il vraiment un droit en dĂ©mocratie ? Les caricatures blasphĂ©matoires sont-elles un droit en dĂ©mocratie ? MalgrĂ© les affirmations du prĂ©sident de la RĂ©publique, je rĂ©ponds non Ă  cette question et je voudrais argumenter ma rĂ©ponse.

En terre d’Islam radical, le blasphème contre le prophète ou le Coran est passible de la peine de mort et dans certains cas par décapitation. Dans l’Église catholique, quand un tabernacle ou un ciboire contenant la présence réelle du Seigneur est profané, les chrétiens célèbrent des messes de réparations et de demande de pardon pour de tels actes de profanation.

Après les attentats de “Charlie Hebdo”, tout le monde Ă©tait “Charlie” ! Personnellement, j’ai toujours affirmĂ© : “Je ne suis pas Charlie”, tout en condamnant avec force les auteurs de cet attentat barbare et odieux. Il Ă©tait fondamental de condamner l’attentat, mais il Ă©tait tout aussi fondamental de me dissocier d’un journal qui fait sa une de caricatures aussi blasphĂ©matoires les unes que les autres.

Lorsque “Charlie” a pu reparaĂ®tre des mois plus tard, la une Ă©tait toujours scandaleuse et m’a profondĂ©ment blessĂ©. Elle reprĂ©sentait le pape BenoĂ®t XVI sodomisĂ© par le prophète ! Et la presse s’est rĂ©jouie de voir ce “journal” renaĂ®tre de ses cendres. Quelques temps après, j’ai eu l’occasion, lors d’un repas Ă  la prĂ©fecture d’Avignon avec le ministre de l’IntĂ©rieur de l’époque, et les reprĂ©sentants des cultes de poser au ministre la question suivante : le blasphème semble faire partie des gènes de “Charlie Hebdo”, mais ne pensez-vous pas que la libertĂ© de publier blasphème et caricatures s’arrĂŞte lĂ  oĂą je blesse gravement mes frères ? Et je lui ai dit combien j’avais Ă©tĂ© profondĂ©ment bouleversĂ© de voir ainsi bafouer le pape BenoĂ®t et mĂŞme de voir bafouer le prophète Ă  travers cette caricature. Il m’avait rĂ©pondu Ă  l’époque qu’au gouvernement, il y avait eu un dĂ©bat, car un certain nombre de ministres condamnaient une telle caricature au nom mĂŞme d’une limite Ă  la libertĂ© dans un monde oĂą nous sommes invitĂ©s Ă  vivre en frères.

Je dois avouer que j’avais pleurĂ© devant une telle caricature qui blessait ma sensibilitĂ© de chrĂ©tien. Comment des journalistes peuvent-ils agir ainsi au nom d’un pseudo droit Ă  une libertĂ© totale et sans limites de caricaturer jusqu’à l’extrĂŞme et de s’en glorifier ? La dĂ©mocratie ou le laĂŻcisme n’ont rien Ă  voir en cela.

Je croyais – naĂŻvement peut-ĂŞtre – que l’homme Ă©tait fait pour vivre en sociĂ©tĂ© et que la RĂ©publique avait cru bon d’emprunter aux chrĂ©tiens le symbole de la “Fraternité” comme emblème de la RĂ©publique ! Si nous sommes appelĂ©s Ă  vivre ensemble en frères, la libertĂ© de chacun s’arrĂŞte lĂ  oĂą je blesse mon frère. Je peux certes entamer le dialogue avec un frère qui ne partage pas mon point de vue, et user de tout mon pouvoir de persuasion, mais dĂ©clarer d’emblĂ©e que le blasphème et les caricatures, quelles qu’elles soient sont un droit en dĂ©mocratie, cela n’est pas juste, cela n’est pas vrai.

En même temps, cela ne justifie en aucune façon la décapitation d’un professeur d’histoire qui voulait réfléchir avec ses élèves sur la portée de telles caricatures et sur un tel blasphème remis au goût du jour dans une presse à scandale.

Je dois avouer combien je suis restĂ© sans voix devant les dĂ©clarations du prĂ©sident de la RĂ©publique, qui plus est parlant depuis le Liban, face Ă  un tel acte. Il a justifiĂ© au nom mĂŞme de la dĂ©mocratie la libertĂ© de dire et de publier tout et n’importe quoi, la libertĂ© au blasphème sous toutes ses formes. Je croyais rĂŞver !
Je comprends qu’il soit de bon ton aujourd’hui de se moquer des religions et de les traĂ®ner dans la boue, mais les auteurs de tels comportements se rendent-ils compte qu’ils bafouent la libertĂ© dans son vrai sens, son sens profond et authentique ?

Au nom mĂŞme de la fraternitĂ©, base de toute vie en sociĂ©tĂ©, je ne peux que redire : la libertĂ© de chacun s’arrĂŞte lĂ  oĂą je blesse gravement mon frère ! Il s’agit lĂ  d’une vĂ©ritĂ© fondement mĂŞme de toute vie en sociĂ©tĂ© ou alors nous allons vers une dĂ©rive totalitaire qui ne dit pas son nom. En mĂŞme temps, il nous faut condamner avec force les actes de violences et de barbarie qui prĂ©tendent rĂ©pondre Ă  cette conception erronĂ©e de la libertĂ©.

+ Jean-Pierre Cattenoz, archevêque d’Avignon

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