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Sciences : Nos capacités intellectuelles dépendent de notre héritage génétique

A présent on le sait : plus de 50 % de nos capacités viennent de l’ADN et non du milieu, comme le postulait le sociologue.

Pierre Bourdieu affirmait en 1964 avec Jean-Claude Passeron, dans Les Héritiers (éd. Minuit), que les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur sont dues essentiellement à des facteurs culturels : l’environnement familial serait la source des différences de performances liées à la capacité à manipuler les codes de la bourgeoisie.

Cette conception part du postulat qu’il n’y a pas de différence innée de capacités. En réalité, on sait aujourd’hui que l’ADN détermine plus de 50 % de notre intelligence. L’école et la culture familiale ne pèsent pas beaucoup face au poids décisif de la génétique, selon les travaux conduits par plusieurs équipes, dont celle de Robert Plomin, du King’s College de Londres.

 Plus frappant encore : le rôle de la génétique croît avec l’âge et, corrélativement, celui de l’environnement familial et scolaire diminue ; la part génétique explique 55 % de l’intelligence à 12 ans et 66 % à 17 ans ! A l’âge de 50 ans, notre ADN expliquerait 81 % de nos capacités intellectuelles. La maîtrise de la lecture est elle-même fortement dépendante de nos chromosomes ; l’école et l’environnement culturel et scolaire n’ont qu’un rôle marginal.

Dynamitons le déterminisme génétique !

 Les travaux récents de Robert Plomin et de Suzanne Swagerman montrent que la causalité est l’inverse de ce que Bourdieu imaginait. Ce n’est pas parce qu’il y a des livres dans les bibliothèques des bourgeois que leurs enfants sont de bons lecteurs, c’est parce qu’ils ont reçu un bon patrimoine génétique. Nos différences de capacités de lecture en sont issues à 64 %, la famille, l’école et nos efforts individuels n’y sont que pour un tiers.

La corrélation dérangeante entre pauvreté, environnement culturel, bagage génétique, capacités cognitives et QI reste taboue. Comme l’indique Franck Ramus, chercheur à Normale sup : « En moyenne, les personnes les plus défavorisées socialement sont aussi les plus désavantagées génétiquement. » Et cette situation risque de s’aggraver à l’ère de l’économie de la connaissance, où les gens les plus intelligents seront avantagés par rapport aux citoyens moins doués.

Que faire ? Se battre, et dynamiter le déterminisme génétique ! En 1900, les enfants atteints de mucoviscidose – maladie 100 % génétique – mouraient en quelques mois… Aujourd’hui, leur espérance de vie dépasse cinquante ans. La dictature du gène, CFTR en l’occurrence, a été cassée par les médecins et les chercheurs. Pour obtenir la même chose en matière d’éducation, il va falloir investir massivement. L’attention pédagogique est concentrée sur l’éducation des élites intellectuelles : des écoles Montessori à Harvard, au MIT ou aux grandes écoles françaises.

Compenser les inégalités neurogénétiques

Il faut maintenant développer les efforts pour les enfants ayant le moins bon patrimoine neurogénétique. C’est-à-dire accentuer la stratégie du ministre Blanquer, développer la recherche en pédagogie et donner des moyens aux grands spécialistes de la cognition : Stanislas Dehaene, François Taddei, Franck Rasmus…

Nous avons fait reculer le cancer en investissant plusieurs centaines de milliards de dollars dans la recherche depuis 1960 : il faut un effort international du même ordre pour trouver des méthodes éducatives qui contrebalancent les inégalités neurogénétiques. Rééquilibrer les chances à travers l’enseignement ne sera pas facile.

Aux Etats-Unis, le « Perry Preschool Project » a testé un programme intensif d’aide aux enfants issus de milieux pauvres et avec un modeste QI. Les résultats ont été encourageants pour l’insertion sociale, mais très décevants sur le QI, qui n’a quasiment pas augmenté. Il ne faut pas nier le déterminisme neurogénétique de 2018, mais le casser d’ici à 2050 !

via L’Express

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